Chapitre 9 ~ Partie 1
Dans l'avion, je pleurais. Je n'ai réussi à me calmer qu'à l'atterrissage. Une personne de la NASA est venue me chercher et m'a conduite chez moi. J'ai fait comme à l'aéroport avec les copains, j'ai fait semblant. Je ne pense pas que c'était réussi, mais mon chauffeur a dû mettre ça sur le compte du voyage et du décalage horaire. Bien pratique. Dès le premier jour j'ai eu beaucoup de travail, j'ai eu la chance extraordinaire de participer à un projet passionnant et j'ai énormément appris. Mais je mangeais peu ayant des nausées régulières, je dormais peu, toujours hantée par ce j'avais vu la veille de mon départ et la douleur d'avoir perdu celui que je considérais comme l'amour de ma vie. En dehors du travail, je me laissais en quelque sorte mourir, je devenais une vraie loque. Je ne savais pas comment j'allais vivre sans lui, et je n'en avais pas vraiment envie non plus. Un mois après mon arrivée, je me suis évanouie en pleine réunion. J'ai été conduite à l'infirmerie. Quand je me suis réveillée, le médecin a commencé à m'ausculter...
Hoshiyo : Je vous assure que ce n'est pas la peine. Je sais pourquoi je suis tombée dans les pommes et je ferais plus attention à partir de maintenant.
Médecin : *perplexe* Et vous pensez que ça vient d'où ?
Hoshiyo : Et bien, depuis mon arrivée je dors assez peu et je ne m'alimente pas suffisamment. Je suppose que le manque de sommeil et une anémie expliquent tout non ?
Médecin : Pas vraiment. Je ne sais pas très bien comment vous le dire...
Hoshiyo : *froide* Si vous voulez m'annoncer que je n'en ai plus que pour quatre mois à vivre, ne vous inquiétez pas, je ne vais ni devenir hystérique, ni me mettre à pleurer.
Médecin : Vous êtes enceinte.
Hoshiyo : *repartant dans son délire* Oui bien sûr... Un ulcère, un cancer ? ... Enceinte ? Vous êtes sûr ? C'est pas possible. Je prends la pilule.
Médecin : J'en suis sûr.
Hoshiyo : Non. Je suis certaine que c'est une erreur. *criant* C'est pas possible je vous dis !
Médecin : Si j'ai bien compris, vous êtes une stagiaire venue de Tokyo. Je vais donc vous donner le nom d'un confrère obstétricien qui pourra vous suivre pendant votre séjour à Houston. Je vous conseille d'aller le voir rapidement parce que je pense que vous êtes à plus de deux mois de grossesse.
Hoshiyo : *pleurant* Bien...
TOUT MAIS PAS CA !!!!!! Voilà ma première réaction. Sur le moment, j'aurais préféré qu'on me diagnostique un cancer. J'ai encore hésité trois jours avant de me rendre chez l'obstétricien. Je n'y suis allée qu'après avoir reçu le mail du patron m'annonçant que Lily avait accouché d'une petite Rose. Ca m'a un peu réveillé... Il m'a alors confirmée que j'étais enceinte, de trois mois. Le sol s'effondrait de nouveau sous mes pieds. Pendant le mois qui venait de s'écouler, je n'ai fait que me lamenter sur mon sort alors qu'un bébé devait lutter pour survivre dans mon ventre. J'ai mis en danger sa vie avant même qu'il ne naisse. Le médecin m'a dit que si je ne prenais pas très rapidement un rythme de vie équilibré, je risquais de faire une fausse couche. Que c'était même un miracle, que le bébé ait résisté si longtemps. Je me suis alors détestée. L'espace d'une seconde, j'ai pensé que si je continuais comme ça, peut-être, avec un peu de chance... J'ai tout de suite regretté. Malgré tout ce qui s'était passé, même si je ne voulais plus jamais voir son père, ce bébé je voulais qu'il naisse. A partir de là j'ai décidé de me reprendre en main. Je dormais plus et je mangeais beaucoup plus. J'avais un rythme de vie beaucoup plus équilibré et je ne travaillais plus 15 heures par jour. J'ai très vite commencé à prendre du poids.
Même si j'étais seule (enfin... plus tout à fait quand même) j'étais dans une bulle, protégée. J'avais demandé à Yû-chan de ne rien me dire en ce qui le concernait. Je ne voulais rien savoir pour ne pas risquer de retomber dans ma léthargie du début. J'ai régulièrement donné des nouvelles aux copains, même le premier mois, pour ne pas les inquiéter. Je leur parlais un peu du travail (sans être un projet secret défense, la discrétion restait de mise), de la pluie et surtout du beau temps, de ce que je voyais, et à partir de juillet, de bouffe (pour faire plaisir à Massu), etc... Bref de beaucoup de choses mais rien de très personnel. J'ai senti un changement dans leurs mails à la fin du mois de juillet. J'ai reçu le même jour six mails. De Yû-chan, Massu, Kei-chan, Shige, Pi, et Ai-chan. Ils me demandaient un peu trop comment j'allais... J'ai su à quel moment ils avaient appris ce qui s'était passé la veille de mon départ. Mais Yû-chan a dû leur dire de ne pas mettre le sujet sur le tapis, parce qu'aucun n'y a fait allusion. Dieu(Baru) merci ! J'ai écrit plusieurs mails à Ryo au brouillon, mais je n'ai jamais trouvé la force de lui envoyer... Est-ce qu'il m'en voudra ? Après tout lui non plus ne m'a pas donné de nouvelles ! Je me sentais mal vis-à-vis de lui...Avant notre dispute, on ne s'entendait pas particulièrement bien mais je l'aimais bien quand même. Il était désagréable avec moi mais avec lui, Yû-chan ou Yamashita-sama, je voyais qu'il était un ami sincère et protecteur. Je ne l'ai détesté que le jour où il m'a profondément blessée... mais il avait raison... Je l'ai frappé et même si je me suis excusée, je me sens gênée... Qu'est-ce qu'il faut lui dire ? A cause de moi il s'est engueulé avec son meilleur ami.
Les seules personnes que j'ai informées de ma grossesse sont ma famille. Ce n'est pas une nouvelle qu'on annonce au téléphone ou par mail, mais comme je ne vais pas voir mes parents avant un an, je n'avais pas vraiment d'autre choix... Pour mes parents j'étais inconsciente d'avoir un enfant si jeune et encore étudiante, ce que je ne peux pas vraiment contredire, mais quand ils m'ont posé la question « Et le père du bébé, il en dit quoi ? » et bien ma réponse n'était pas vraiment celle qu'ils attendaient. Même si ma mère n'envisageait certainement pas d'être belle-mère et grand-mère avant au moins dix ans, elle s'imaginait déjà débarquer à Tokyo pour organiser un mariage en grande pompe et trouver un grand appartement pour ma nouvelle famille et l'aménager à son goût. Elle est tombée de très très haut. Ma nouvelle famille... Il n'y aura que mon bébé et moi...
Pour Yû-chan et les copains, j'ai décidé de leur dire quand je serais de retour... Enfin plus que leur dire, ils pourront le voir ! Ca leur fera un choc mais je ne me vois pas dire au téléphone : « Salut Yû-chan ! Ca va ? Pour moi tout va bien. Oh ! Et puis je suis enceinte ! ». Vraiment, je ne pouvais pas faire ça. Ils seront tous surpris et ils m'en voudront certainement de leur avoir caché.
photo : Houson
source : home.houston